Les Messagers Sacrés

Médicinale s’assoie prés du feu, regarde ses amis réunis dans la salle. Elle s’aperçoit qu’ils ne connaissent rien de sa vie.
…
Ses yeux se perdent dans les lueurs du feu.
D’une voix douce et chargée d’émotions, Médicinale assise en tailleur raconte son histoire.

Je suis née sur les rivages doux de Connla.
J’ai de mon enfance des souvenirs de pauvreté sans misère, gaie et insouciante. Terrassée par des petits gnomes insupportables ou des hommes boues je me réveillais en face de mon instructeur, obligée de m’asseoir secouée par le fou rire.

La plage, le soleil de Connla, le vent iodé dans mes cheveux…le sel et le sable sur ma peau.
Je me souviens de la saveur du Crabe des Mers, grillé au feu de Bois Flotté.

J’avais une sœur jumelle quelque part sur Hibernia, une barde nommée Musicale. Mariée et folle amoureuse d’un superbe finelame du cinquantième cercle, elle me garda secrète et libre jusqu’à mon quinzième cercle je crois.
Libre et solitaire, le vent de l’aventure dans mes boucles hirsutes… Combien de fois j’interrompais de folles chevauchées en sautant de cheval pour ressusciter un valeureux guerrier tombé au combat ?
Oh quelle fierté de ressentais, protéger soigner et relever les guerriers tombés.

Bientôt je fus courtisée, j’ai eu la chance de rencontrer des hommes séduisants et de splendides jeunes femmes. Tous courtois, adorables, valeureux, avec qui j’ai eu de longues discussions passionnantes.
Mais j’étais la petite bulle d’air de ma sœur Musicale, trop soumise à son époux possessif.
J’étais insaisissable, inaccessible et ... si jeune !!!
Ils ont tous perdu leur temps.
Petit tigre fou lâché sur Hibernia, je garde un souvenir ému de toutes ces belles rencontres.

Ma plus belle rencontre fut sans doute Agres, une petite bombe Lurikeen, enchanteresse de la Lune avant que ce métier ne soit populaire.
Nullement effrayée par les nouvelles expériences et les mort successives, nous avons formé une fine équipe, et j’ai gravi maints cercles en sa compagnie.

L'insouciance dura prés de vingt cercles ...
Puis ... vint ce jour fatal…

Le visage de Médicinale s’assombrit, elle regarde les amis qui l’écoutent.

Ce fut le jour où …


Musicale finit par me livrer à son époux jaloux, pressant … amoureux.
Il me voulait, moi aussi.
Par amour, elle renonça à sa petite bulle de liberté et me sacrifia.
Je devins une autre Musicale. Puis fini par supplanter mon aînée.
On ne renonce pas facilement à la liberté, aux courses folles et solitaires, au vent dans ses cheveux… au souffle d’or qui vous pousse en avant…

Quelques années s’écoulèrent et je fis avec celui qui était devenu mon époux, ma fille Epineuse.

Un voile de chagrin passe sur le visage doux de Médicinale… Elle resserre les bras autour d’elle et se balance doucement devant le feu, cherchant le réconfort. Elle s’apprête à faire un aveu difficile

Je l’ai abandonnée le jour de sa naissance.

Médicinale garde un moment le silence, les larmes au yeux.

Elle dit souvent qu’elle a été élevée par les Loups… C’est vrai.
Je l’ai regardé pousser pendant 20 cercles, ma précieuse petite sauvageonne.
Elle fût ma bulle de liberté. Elle, au moins, était libre comme le vent.
En l’abandonnant je la protégeais de mon époux.
Druidesse symbiose elle n’avait besoin d’aucun ovate pour grandir en expérience.
Vingt cercles, seule, sans jamais un groupe, hérissée d’épines, elle repoussait toute tentative d’approche amicale (ou… amoureuse) avec violence.

Privée d’amour maternel, privée de famille, de maison, elle devint une petite sauvage. Je la tint éloignée des Messagers Sacrés où je vivais à l'époque avec son père.
Elle chassait dans les lieux les plus reculés du royaume pour éviter de croiser qui que ce soit.

Mais le destin et la Déesse nous a réunies de la façon la plus improbable qui soit…

Un sourire vient chasser le chagrin des yeux de Médicinale au souvenir de cet étrange dénouement…

J’ai grandi rapidement, presque facilement, aidée par ma guilde et mon Epoux. J’atteins le sacre ultime du cinquantième cercle.
J’obtins à Innis Carthaig une armure épique de toute beauté que je fis émailler en doré.

Puis je fis une rencontre étonnante un soir où je revenais d’une longue absence, une voix inconnue dans la Maison des Messagers … Kathalina.

Vous souvenez- vous d’Agres, l’enchanteresse folle de mon enfance ?
Imaginez qu’elle eût une fille, Kathalina qu’elle lança sur mes traces.
Elle était décidée à …

Médicinale sourit, les joues légèrement roses

…conquérir mon cœur.

Kathalina me courtisa… oh Déesse … elle était irrésistible.
Mais mon cœur est fidèle, et même si j’étais en train de mourir étouffée par mon mari, jamais je n’ai pu commettre une telle tromperie.

Ce fut Epineuse qui tomba amoureuse de la belle Kathalina. Or la belle ne voyait que moi dans les yeux de ma fille.
Epineuse a fini par me haïr.
Après l’avoir abandonnée, je lui volais son amour.

Elle se retrancha derrière une barrière d’épines plus épaisse encore.
De sauvage elle devint furie.
A son vingtième cercle elle ravagea le repaire Spraggon avec une violence inouïe.
Kathalina vint la retrouver.
Après une longue, dure et merveilleuse bataille …elle se marièrent.
Ma fille et moi nous avons enfin fait la paix.

< un silence >

Mais le jour vint où mon époux découvrit en même temps, ma fille ET sa fiancée. Sa souffrance fut inouïe et sa colère… en proportion …