par Symbia » Lun 10 Jan 2005, 12:42
CYRANO, imperturbable.
C'est tout ?...
LE VICOMTE
Mais...
CYRANO
Ah ! non ! c'est un peu court, jeune homme !
On pouvait dire... Oh! Dieu!... bien des choses en somme.
En variant le ton,-par exemple, tenez:
Agressif: " Moi, Monsieur, si j'avais un tel nez,
Il faudrait sur-le-champ que je me l'amputasse ! "
Amical: " Mais il doit tremper dans votre tasse !
Pour boire, faites-vous fabriquer un hanap! "
Descriptif: " C'est un roc ! . .. c'est un pic ! . . . c'est un cap !
Que dis-je, c'est un cap ?. .. C'est une péninsule ! "
Curieux: " De quoi sert cette oblongue capsule ?
D'écritoire, Monsieur, ou de boite à ciseaux ? "
Gracieux: " Aimez-vous à ce point les oiseaux
Que paternellement vous vous préoccupâtes
De tendre ce perchoir à leurs petites pattes ? "
Truculent: " Ça, Monsieur, lorsque vous pétunez,
La vapeur du tabac vous sort-elle du nez
Sans qu'un voisin ne crie au feu de cheminée ? "
Prévenant: " Gardez-vous, votre tête entrainée
Par ce poids, de tomber en avant sur le sol ! "
Tendre: " Faites-lui faire un petit parasol
De peur que sa couleur au soleil ne se fane ! "
Pédant: " L'animal seul, Monsieur, qu'Aristophane
Appelle Hippocampelephantocamelos
Dût avoir sous le front tant de chair sur tant d'os ! "
Cavalier: " Quoi, I'ami, ce croc est à la mode ?
Pour pendre son chapeau, c'est vraiment très commode! " ,
Emphatique: " Aucun vent ne peut, nez magistral,
T'enrhumer tout entier, excepté le mistral ! "
Dramatique: " C'est la Mer Rouge quand il saigne ! "
Admiratif: " Pour un parfumeur, quelle enseigne ! "
Lyrique: " Est-ce une conque, êtes-vous un triton ? "
Naïf: " Ce monument, quand le visite-t-on ? "
Respectueux: " Souffrez, Monsieur, qu'on vous salue,
C'est là ce qui s'appelle avoir pignon sur rue! "
Campagnard: " He, arde ! C'est-y un nez ? Nanain !
C'est queuqu'navet géant ou ben queuqu'melon nain ! "
Militaire: " Pointez contre cavalerie ! "
Pratique: " Voulez-vous le mettre en loterie ?
Assurément, Monsieur, ce sera le gros lot! "
Enfin, parodiant Pyrame en un sanglot:
" Le voilà donc ce nez qui des traits de son maître
A détruit l'harmonie! Il en rougit, le traître! "
- Voilà ce qu'à peu près, mon cher, vous m'auriez dit
Si vous aviez un peu de lettres et d'esprit:
Mais d'esprit, ô le plus lamentable des êtres,
Vous n'en eûtes jamais un atome, et de lettres
Vous n'avez que les trois qui forment le mot: sot!
Eussiez-vous eu, d'ailleurs, I'invention qu'il faut
Pour pouvoir là , devant ces nobles galeries,
Me servir toutes ces folles plaisanteries,
Que vous n'en eussiez pas articulé le quart
De la moitié du commencement d'une, car
Je me les sers moi-même, avec assez de verve
Mais je ne permets pas qu'un autre me les serve.
< fait une légère révérence à Sieur Totonounet >