par Johnn » Mar 14 Juin 2005, 15:56
Sur la gauche du protecteur, le lac scintillait de milles feux. Il était arrivé à Howth. Howth si cher à sa mémoire. C’est là qu’il l’avait vu pour la première fois. Plein de pudeur, il n’osait pas quitter l’ombre de la hutte du maître protecteur pour aller la retrouver. Pourtant, aucune force au monde n’aurait pu empêcher cette rencontre. Il n’y eu pas besoin de mots ou de gestes, une magie plus ancienne et plus puissante que celle des elfes fît son ouvrage. Elle tissa des liens si forts qu’ils resteraient intacts même lorsque le monde sera brisé.
Il repensa à ce soleil couchant ou devant ses yeux, il avait franchi la limite des compétences de son maître. Ce soir là bien sûr, ils étaient tout deux vers Innis Carthaig. Ils avaient ferraillé d’abondance pour y parvenir. Pourtant ce soir là , curieusement, son cœur n’était pas remplit de joie, il avait franchi une étape et il avait peur. Peur que cela marque une fin, qu’il change pour devenir autre chose que ce qu’il était vraiment. Mais elle était près de lui et lorsqu’elle le sera contre elle, il sût que cela n’avait guère d’importance.
Quelques semaines plus tard, c’est elle qui entra dans le haut cercle des druides. Au même endroit, contre les mêmes adversaires, les pooka. Et ce soir là quelque part dans le vieux royaume, la sentinelle Chegwidden franchit elle aussi la ligne étroite de la parfaite maîtrise. Elle fût aidée en cela par le champion roux, Mugathdem. Et ce jour, le cœur du protecteur fût en joie, il le fût encore d’avantage lorsque l’un et l’autre, côte à côte, ils combattaient encore. Elle dans sa magnifique armure d’argent offerte par les grands druides et lui dans son armure noir et or symbole des hauts rangs de son ordre. Il fît cadeau à la sentinelle d’une très belle arme avec l’espoir secret qu’elle lui sauverait la vie dans les moments critiques.
Il songea aussi à sa première rencontre avec Cuuldurach. Le roi blafard, la terreur d’hibernia. Une créature de légende, invaincu et invincible. Et pourtant, il avait fait un pari fou lorsqu’il était là bas, luttant férocement contre les loups à Tir Na Nbeo. Il le combattrait, pour elle. Un défi gigantesque à la proportion du grand roi dragon. La quête ultime en son honneur et l’espoir fou de le vaincre. Pour cela, il fallait convaincre, organiser, défendre, chercher les failles du vieux roi. Trouver la faiblesse dans la cuirasse apparemment parfaite. Le grand miracle n’eu pas lieu, mais le miracle oui. Des jours durant, il négocia avec les chefs des plus grandes guildes mais aussi des plus modestes. Et à force de patience, de persévérance, tous étaient là . Fian, Fear, CDD, Equinoxe pour les plus grosses, et une multitudes d’autres comme les dragons de Mithril et bien sûr les anges gardiens. Ce soir là , Cuuldurach confirma qu’il était une légende et il mis rapidement fin aux attaques pourtant féroces des quelques cent quatre vingt hiberniens qui étaient venus le défier. Un nom resta dans les mémoires, celui de ce petit protecteur un peu fou qui l’espace de quelques heures avait fait battre les cœurs des habitants du royaume au même rythme. Et pour lui, au-delà de tout ça, bien que le dragon ne fût pas chassé ce jour là , il resta les larmes et l’émotion d’avoir accomplit quelque chose de grand dans le seul but de lui montrer la force de son amour.
Aujourd’hui bien sur, cela le nouait encore de l’intérieur. Au fond, il aurait aimé que le roi blafard reste à jamais invaincu. Mais le voile se déchira et il ne laissa au vieux roi qu’une infime partie de son pouvoir d’entant. Il devînt une proie plus abordable et c’est dans la fuite qu’il trouva son salut. Le monde avait changé. Tant de choses avaient changées. Lui aussi sans doute sous certains aspects. Une chose pourtant demeurait.
Il pensa à Demih, la petite Lurikeen que phaey avait trouvé dans la forêt. Le secret de sa présence dans la forêt maudite restait entier. Cela intriguait le protecteur, d’avantage pour savoir si il pouvait l’aider que pour satisfaire sa curiosité. Siris, la fille qu’il avait eue avec elle n’était plus. Elle reposait en terre dans un endroit secret et paisible. Peu de monde savait qu’Ajalon avait eu un enfant. Déliana le savait bien sûr et elle avait été particulièrement odieuse avec la jeune fille. Et Siris s’en était plainte de nombreuses fois auprès de lui. Pourtant Ajalon savait que dans ses absences obligées, Déliana veillait. Qu’elle n’hésiterait pas à user d’une magie qui pourrait la consumer pour sauver sa fille. Mais elle faisait la vie dur à Siris et à sa manière, elle la prépara au destin tragique qui fût le sien. A la mort de Siris, Ajalon soupçonna Déliana d’avoir toujours su comment cela finirait. Il lui en voulu un temps puis fini par se dire que soit il se trompait, soit il en avait été mieux ainsi.
Demih recevrait son armure et son bouclier, il en avait décidé ainsi. Quelque chose le touchait dans ce qu’il avait vu en elle sans qu’il ne pu l’expliquer. Entre le secret et l’innocence. Il lui faudrait se hâter et lui expliquer l’essentiel, mais le plus important, elle le découvrirait elle-même. Il n’avait qu’un vœu, qu’elle accepterait de la porter lorsqu’elle irait saluer le vieux roi. Il n’avait aucun doute, Cuuldurach la reconnaîtrait sans peine. Ce serait un message de respect entre deux vieux adversaires devenus amis. Le salut du protecteur vers celui qu’il admirait le plus. Inconsciemment, il refusait que tout disparaisse. Il voulait que demeure une trace, au-delà des souvenirs. C’était là son seul orgueil.
Sans que personne ne le remarque, il avait déjà rédigé de nombreux parchemins et organisé son départ. Ce n’est pas ça qui allait changer le monde, lui-même n’avait rien changé, rien empêché. C’était là son avis. Pourtant, sans en avoir conscience, il n’avait fait. Certes dans un cercle restreint, mais sans doutes aucun. Il avait changé la vie de ceux qui avaient croisé son chemin, l’avait rendu plus belle, a sa manière. Parfois il avait agit avec maladresse, il avait blessé de manière involontaire parce que parfois, il n’y a pas le choix. Mais tout ce qu’il avait fait l’avait été sans malice, sans méchanceté volontaire. Pourtant sa décision était prise, et il n’y aurait pas de retour. Il avait choisi sa vie, lutté, parfois seul contre tous pour défendre sa vérité première. Il n’y avait pas la moindre trace de doute dans son esprit. Il l’avait comprit lorsque marchant dans la neige immaculée de Midgard, il avait vu ses propres traces. Et il avait compris. Compris que rien n’était écrit, qu’il choisissait son chemin même si il ne pouvait en prévoir les obstacles. Et ce jour là il su comment cela finirait, même si il le redoutait.
A suivre.