Au delà des Bois

De nobles conteurs, à l'esprit empli de légendes et de hauts-faits, parcourent souvent notre belle place ! Venez les écouter !

Au delà des Bois

Messagepar Mériam » Lun 03 Nov 2003, 15:56

Assise dans la cuisine, je somnole, enveloppée de la chaleur du feu et des senteurs de canelle.
Grand-Ma prépare son gâteau spécial pour les réjouissances de demain, lorsque je partirais 3 jours durant, dans la forêt pour mon initiation.

3 jours et 3 nuits, seule dans la forêt, afin d'accomplir le Rite de la Symbiose et ainsi rencontrer mon animal de Lien.
Cette âme soeur, ce compagnon de nature qui choisira d'attacher ses pas aux miens, tout au long de nos deux vies et qui me fera Druidesse, ainsi qu'il a toujours été dans mon clan.

Grand-Ma s'affaire, silencieuse et je ne la dérange pas car je sais qu'elle est en dialogue profond avec la Grande Mère, comme très souvent depuis quelques temps.
Mon silence est différent....
C'est un silence d'attente impatiente et d'anticipation rêveuse...
J'ai tant désiré ce jour qui, je le sais, va transformer ma vie !

Je me vois déjà revenir triomphante aux côtés de mon animal de Lien....
Un loup peut-être, j'ai toujours aimé les loups !
Enfin Druidesse !
Je vois les yeux brillants de ma mère, le sourire tendre qu'elle aura pour moi ... Ce sourire tant attendu
Et mon père ... mon père et ses bras ouverts qui me serrera sur son coeur éclatant de fierté...
Mes parents enfin rendus...
Guéris du souvenir terrible de notre dernier Druide, Mélio, mon frère, à jamais disparu...
Mes parents qui, peut-être alors, m'aimeront de nouveau .....

Absorbée dans cette rêverie tant de fois rejouée, je sursaute lorsque Grand-Ma commence...
Sa voix semble plus grave aujourd'hui....


" C'est un tout jeune musicien qui vit paisiblement dans son village natal, qu'il n'a jamais quitté.
Ce jeune homme, tout a fait ordinaire et tranquille possède néanmoins une particularité : Sa voix !
Une voix si belle et si parfaite qu'il est devenu, bien avant l'âge, le musicien attitré du village et qu'il enchante la taverne de ses ballades.
La musique donc est son art, sa passion et sa vie.
Il est à sa place et ne demande qu'à continuer ainsi.

Pourtant, ces dernières semaines, son air troublé et absent a surpris ses amis...
Et s'il est effectivement troublé, c'est que depuis quelques temps, il entend quelque chose.
Un son, une mélodie lointaine et persisitante qui semble venir d'au delà des Bois.
Quelque chose d'étrangement beau qui pénètre son âme, parfois jusqu'à le laisser en larmes.

- Entendez-vous ?!!! a-t-il d'abord demandé à ses amis

Mais devant leur étonnement, puis leurs rires, il a compris qu'il était le seul à percevoir cette étrange symphonie.
Il a tenté de l'ignorer alors, simplement.
Mais comme je l'ai dis, cette mélodie pénétrant jusqu'à son âme, ses jours et ses nuits même en sont investis.
Et bientôt, au rythme de ces notes étranges est né en lui un désir, une envie qui s'est tranformée en Appel ardant.
Désormais, il n'a plus qu'un souhait : Partir et trouver !
Trouver et comprendre.... Remonter jusqu'à l'origine de cette musique troublante !

Aussi, un matin, notre jeune musicien qui n'a jamais quitté son village, décide-t-il de partir à la recherche de cette mélodie qui l'appelle au delà des Bois.
Après un bref au revoir à ses amis amusés, à qui il assure que c'est l'affaire de quelques jours, il s'enfonce le coeur léger dans cette forêt qu'il n'a jamais explorée.
Ne se fiant qu'à son oreille pour le guider, il marche un jour, puis un autre et encore un, entraîné un peu plus loin chaque matin.

Ses provisions sont ainsi vite épuisées.

Mais, désormais déterminé à accomplir cette étrange quête, il se contente des quelques baies et noisettes trouvées sur sa route.
Et malgré sa faim grandissante, malgré les nuits froides et rugissantes de bruits inconnus et effrayants,
malgré la tentation de retourner parfois, lorsque la pluie se fait trop glaciale, il continue sur son chemin tracé de notes.
C'est un de ces soirs, courbatu et transis, alors que dans un dialogue intérieur, il réafirme une nouvelle fois sa détermination à continuer que l'Ours Brun le surprend et se jette sur lui...

Notre jeune ami n'a pas vu arriver l'Ours et il est bien sûr trop tard pour fuir.
Aussi, fait-il simplement face au monstre écumant.
Le combat est bien inégal et malgré son courage, l'Ours a bien vite le dessus.
Lorsque celui-ci en a fini, notre jeune musicien est presque mort.
Alors que les minutes s'egrennent, lui volant chaque fois de nouveaux pans de conscience,
ses dernieres pensées ne vont, non pas à son village ou ses amis, ses parents ou son confort d'antan, mais à sa quête qu'il ne pourra achever.
Ses derniers instants sont teintés de cette tristesse, ce douloureux regret de n'avoir pu trouver la Musique au delà des Bois.

C'est alors que tout ce qui l'entoure semble se tranformer soudainement.
Cela commence par un chatoiement, une vibration...
L'air lui même se met à onduler et scintiller.
De la lumière, de la lumière partout ... Puis des concerts de rires, de musique et de chants.

Enfin, elles apparaissent.

Là où, l'instant d'avant, il n'y avait rien que les arbres, dans le soir finissant, elles sont désormais partout !
Des Fées...
Des Fées partout... qui dancent et virevoltent au son des musiciens, des fées près de banquets emplis de victuailles.
Partout la musique, la lumière et les rires emplissent ses sens déclinants.

Il ferme les yeux alors simplement.

Lorsqu'il les ouvre à nouveau, il est allongé.... Plus aucune douleur ne déchire son corps, ses plaies ont disparues...
Il entend toujours les musiciens et les rires.
Tout semble être Fête ici !
Il est conduit alors, devant une femme d'une grande beauté.
Une beauté terrifiante et glacée...
Une femme comme il n'en a jamais vu et qui assise sur une Haute Chaise, semble présider à ces festivités débridées.

- Que fais-tu ici petit mortel ? Demande-t-elle alors.
Qui t'a permis de profaner ainsi le lieu de villégiature de la Cours des Fées ! Et comment vas-tu payer notre Cours pour ta vie qu'elle a épargnée ?

- Noble Dame, toutes mes excuses.
Je ne suis qu'un humble musicien qui, égaré dans la forêt, s'est fait attaquer par un Ours.
Je croyais être mort et arrivé en ma Dernière Demeure, mais je comprends maintenant que vous avez sauvé ma vie.

La musique s'est tue.
L'impérieuse femme le regarde attentivement et il sent que soutenir plus longtemps ses yeux glacés, le tuerait plus douloureusement encore que les griffes de l'ours ne l'avaient fait.
Aussi, tout en la remerciant, baisse-t-il la tête en s'inclinant devant elle.

- Et bien, saches que tu te trouves à la Cours des Fées, dont je suis la Reine.
Et tes remerciements ne me suffisent pas !
Si tu veux garder cette insignifiante chose que tu appelles ta vie, alors il va te falloir nous divertir !
Tu te dis musicien ? Alors chantes !
Qu'on lui donne un instrument et qu'il prouve son talent.

Prenant l'instrument, il commence a chanter.
Dans le silence, sa voix pure monte et se renforce.
Quelque chose d'étonnant alors se produit :
Sa peur disparaît, son coeur s'allège et son âme tout à coup vibre au diapason des notes qui deviennent comme un rempart, un abri d'une douceur infini.
Tout son être s'épanouit au creu de cette émotion soudaine et la Reine sourit.

A ce signal, les musiciens l'accompagnent à leur tour, les dances reprennent et le jeune musicien se fond sans retenue dans l'extase née de cette union.
Il chante.
Il joue désormais jusqu'à se perdre totalement.
Non plus pour sauver sa vie, jusque là épargnée, mais pour trouver à nouveau cette félicité qui monte et qui l'accueille dans cet oubli parfait ou plus rien n'existe de ses épreuves passées.

Aussi, chaque soir, lorsque la Reine le lui demande, il chante.
Encore et encore, afamé désormais de vivre et retrouver cette explosion en lui de sens et de sons.
Accompagnant la Cours dans chacun de ses sauts, en chaque lieu nouveau il oublie,
ne vivant desormais que pour cette jouissance sans fond.

Un soir pourtant, alors qu'il a presqu'oublié jusqu'à son nom, quelque chose dans son esprit engourdit se met à bouger.
Un son insistant, étrange et familier qui semble l'appeler d'au dela des Bois.
Dans une fulgurante clarté tout lui revient alors, le souvenir éclate : sa Quete !
Il doit partir et trouver cette étrange mélodie qui l'a guidée jusqu'ici.
C'est pour cette raison qu'il avait tout quitté !!

A l'aube naissante, ce matin là,
alors que la Cours toute entière va s'enfoncer dans un sommeil profond et rejoindre un autre lieu de festivité, il s'éloigne et se maintient éveillé afin que la Magie n'opère pas sur lui.
Il sait qu'ainsi, il ne les suivra pas.
Il a une quête à terminer, il s'en souvient désormais !

Aux premières lueurs, il voit disparaître La Cours des Fées dans ce même chatoiement qui l'avait annoncée.
Il sait qu'il quitte a tout jamais cette Félicité sans nom qu'il ne pourra retrouver.
Et c'est tremblant et sanglottant qu'il sombre à son tour dans un sommeil profond....


(a suivre ;) )
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Messagepar Tower » Lun 03 Nov 2003, 16:06

vraiment très joli
(tu ne te serais pas inspirée des légendes nordiques qui disaient que si on entrait dans la ronde des elfes, on y restait à jamais ?)
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Messagepar Mériam » Lun 03 Nov 2003, 16:57

Je ne sais pas si la légende est Nordique mais il est vrai que c'est de cette Cours dont je me suis inspirée :)

Ma référence à moi, pour ceux qui connaissent, est dans un Livre de Marion Zimmer Bradley : "Les Dames du Lac" qui retrace la période d'Arthur et des chevaliers de la table ronde, du point de vue de Morgane la Fée ;-)
Ce qui change bien des perspectives :wink:
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Messagepar Garhet d'Ambre » Lun 03 Nov 2003, 17:51

Moi, je dis, comme toujours, c'est beau, c'est merveilleux. :)

Et il n'y a jamais rien à ajouter si ce n'est : encore... :D
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Messagepar Theothorn » Mer 05 Nov 2003, 15:07

Bon ben la suite, quoi ! J'en peux plus d'attendre !
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Messagepar Tower » Mer 05 Nov 2003, 15:12

Tout vient à point à qui sait attendre :wink:
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